Trois études sur les bidonvilles et leurs habitants

 

(Groupe Longues marches)

 

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[ version en espagnol ]

 

I - Le bidonville n’est pas un trou noir.

1) Singularité du lieu

Thèse négative

Thèse affirmative

2) Régularité des gens qui y vivent

3) Comprendre cette contradiction

4) Quatre tâches

5) Nous lier aux habitants

II - Qu’est-ce qu’une singularité ?

1) Singularité algébrique

2) Singularité topologique

Conséquences : quatre traits des bidonvilles

3) Singularité algébrique / singularité topologique

III - De la singularité des bidonvilles

1) Le bidonville n’est pas une zone libérée !

Bidonvilles et camps ?

2) Le bidonville concentre sept contradictions du monde contemporain.

3) Le bidonville est un disque tourbillonnant à la pointe de la ville.

Ce que débrouillardise veut dire…

 

I - Le bidonville n’est pas un trou noir.

1) Singularité du lieu

Les bidonvilles sont vus, par le monde actuel, particulièrement le monde des villes marchandes, comme des trous noirs : on n’y voit rien que du noir, on n’en sort pas, c’est une particularité naturelle de l’univers, on y est aspiré, on n’en sort que d’un autre côté (dans un univers parallèle via les « trous de ver »), la lumière ne peut en sortir.

Thèse négative

Notre thèse (négative) : le bidonville n’est pas un trou noir.

1.     Il n’est pas vrai qu’on n’y voit que du noir : on y voit des gens qui y habitent.

2.     Il n’est pas vrai qu’une fois entré, on n’en sorte pas : les gens qui y vivent passent leur temps à en sortir pour travailler dans la ville (comme gardiens pour les hommes, comme boniches pour les femmes).

3.     Il n’est pas vrai que le bidonville est une situation naturelle : le bidonville est une création sociale et politique, singulièrement une création coloniale au Maroc (le premier bidonville est apparu vers 1920 à Casablanca, dans « les carrières » à proximité des nouvelles cimenteries Lafarge).

4.     Il n’est pas vrai qu’on y est aspiré : on y entre parce qu’on y est refoulé, rejeté par le monde de la ville ; on y entre comme « déchet » humain de la ville.

5.     Il n’est pas vrai que la seule issue soit « de l’autre côté », autant dire du côté d’un paradis post-mortem : une issue est - doit être - de transformer ce lieu.

6.     Il n’est pas vrai que la lumière n’en sorte pas : tout au contraire, notre hypothèse est que le bidonville dit quelque chose d’essentiel et de global sur le monde contemporain. Il s’agit précisément pour nous de mieux comprendre Casablanca, le Maroc, le monde, tels que vus à partir du bidonville.

Thèse affirmative

Notre thèse (affirmative) : le bidonville est une singularité du monde contemporain, à l’égal de la grande usine.

Une singularité - la mathématique nous l’apprend (voir étude suivante) - est une localisation exceptionnelle qui est le symptôme des contradictions d’ensemble sous-tendant l’ordre apparent du monde.

En première approche du caractère singulier du bidonville, on dira que c’est un lieu à la fois marginal et central, tout autant marginal que central :

-      marginal car situé aux marges de la ville et considéré comme tel ;

-      central car il est emblématique du développement séparé (« apartheid ») du monde contemporain (un milliard d’êtres humains habitent en bidonville).

Tout de même, les grandes usines sont centrales (la production industrielle du monde repose sur elles) et marginalisées (elles sont soumises à une réglementation spéciale, elles sont mises à l’écart et on ne peut y entrer).

De telles singularités concentrent les contradictions du monde contemporain et on peut mieux comprendre ce monde à partir d’elles !

2) Régularité des gens qui y vivent

Si le lieu bidonville est singulier, par contre les gens qui y vivent sont « réguliers » c’est-à-dire sont comme tout le monde, comme nous. Il ne s’agit pas là d’une autre humanité.

On pose donc qu’il y a deux types de lieux (le monde de la ville et le bidonville) mais une seule humanité.

3) Comprendre cette contradiction

Il s’agit pour nous de comprendre la singularité de ce lieu et la régularité de ces gens.

Comprendre la singularité du bidonville est une première chose.

Comprendre comment des gens ordinaires y mènent une vie extraordinaire en est une seconde.

Deux écueils en ce second point :

-      mettre en avant la « résilience » de ces gens, leur capacité d’adaptation, leur faculté d’accepter l’inacceptable : appelons cela l’orientation bouddhiste, ou stoïcienne, ou augustinienne ;

-      mettre en avant leur débrouillardise, leur potentiel individuel pour aller y recruter des forces vives : appelons cela la voie affairiste.

Notre hypothèse est ici celle « des points individuellement tenus » : enquêter sur la manière dont les gens mènent une vie droite en tenant le point existentiel qui, pour eux, concentre la dignité et la grandeur de la vie humaine, leur point microscopique « d’immense orgueil » par lequel quelque chose du sort global de l’humanité se joue pour eux (en ce point spécifique, céder ou continuer devient affaire globale).

4) Quatre tâches

Nous avons donc à comprendre :

-      la singularité du bidonville ;

-      le monde contemporain à la lumière du bidonville ;

-      les gens « réguliers » qui y vivent : leurs « points » ;

-      les Idées que nous pouvons soutenir et apporter : nos « points ».

5) Nous lier aux habitants

Pour comprendre tout cela, notre principal « opérateur » est notre relation avec les gens du bidonville, relation à constituer, contre d’autres types de relation :

-      contre les relations de type humanitaires : nous ne sommes pas des bienfaiteurs, des libérateurs, des sauveurs, des faiseurs de miracles ;

-      contre les relations de type objectivantes (enquêtes sociologiques, démographiques, urbanistiques, psychologiques, etc.) ;

-      contre les relations de type affairistes : recruteurs, animateurs, etc.

Notre tradition en matière de relations est la camaraderie politique et militante.

Dans cette tradition, il s’agit de faire, d’étudier et de comprendre ensemble et à égalité.

II - Qu’est-ce qu’une singularité ?

Pourquoi étudier cette notion ?

Car nous faisons l’hypothèse que le bidonville est une singularité du monde contemporain. Mais que veut dire ici « singularité » ?

L’orientation de travail est de s’éclairer en ce point de la mathématique, qui plus est de la mathématique la plus contemporaine (la première partie de l’exposé vient des années 60 - Hironaka, la seconde vient des années 90 - Drinfeld) plutôt que de la philosophie (dialectique de l’universel et du singulier, en tant qu’elle diffère de la dialectique du général et du particulier).

 

L’orientation générale va être « kierkegaardienne » au sens de sa réduplication : tout de même qu’il faut parler humblement de l’humilité (car en parler orgueilleusement serait en parler inadéquatement), il faut parler singulièrement de la singularité c’est-à-dire selon deux versants relativement opposés car une singularité est un traitement particulier d’une opposition, d’une contradiction, d’une réalité à deux versants opposés.

Présentons d’abord ce qu’est une singularité d’abord sous un versant qu’on dira « algébrique » puis détaillons cela sous un versant qu’on dira « topologique » pour voir enfin comment ces deux versants s’articulent.

1) Singularité algébrique

L’image la plus simple de la singularité algébrique est la pointe d’un cône.

Cette pointe se caractérise par le fait que c’est le seul endroit du cône qui pique la main caressant la surface (mathématiquement : le seul point sans plan tangent).

La singularité algébrique se manifeste donc par une propriété phénoménale - « ça pique » - qui est tellement rare sur le cône (un point et un seul dans une infinité de points) qu’on pourrait être tenté de répondre : « puisque c’est quantité négligeable, négligeons-le ; on n’en a pas besoin pour comprendre le cône ! ».

Ce que la mathématique montre ici, c’est que tout au contraire, la singularité, précisément par son exception (et non contre elle) dit quelque chose d’universel sur ce qu’est un cône : en gros, un cône, c’est un cylindre (imaginons-le vertical) dont on resserre progressivement vers le bas la taille du cercle horizontal jusqu’à atteindre zéro c’est-à-dire jusqu’à le réduire à un point : le point de la pointe.

Donc un cône est une sorte de dynamique, d’opposition dynamique, de contradiction dynamique entre deux tendances orthogonales (incompatibles) : une stabilité verticale (celle du cylindre) et un resserrement horizontal (celui du cercle). L’action de cette contradiction est ce qui engendre le cône mais cette action ne se sent, ne se manifeste nettement qu’à la pointe lorsque les deux aspects de cette contradiction (stabilité verticale, resserrement horizontal) n’y sont plus séparés mais confondus.

La spécificité phénoménale de la pointe tient très précisément au fait que les deux termes contradictoires, clairement séparés partout ailleurs sur le cône, y sont rendus indiscernables. C’est pour cette raison que c’est là et là seulement que « cela pique » car c’est là et là seulement que les deux tendances orthogonales fusionnent.

 

L’idée que cette singularité algébrique (Hironaka) nous lègue est donc qu’une singularité est un point (local) d’une situation (globale) qui fusionne, rend localement indécidables deux aspects d’une contradiction globalement à l’œuvre. Une singularité manifeste, par un trait phénoménal extraordinaire, unique, que l’ensemble de la situation (dont elle est la singularité) est structurée par une contradiction globale.

C’est donc l’exact inverse de l’idée que la singularité étant archi-rare n’est qu’une exception négligeable : c’est tout au contraire son caractère d’exception qui indique qu’elle manifeste localement une contradiction globalement à l’œuvre, une contradiction structurant l’ensemble de la situation dont elle est la (ou une) singularité.

On voit bien ici l’intérêt de cette notion algébrique de singularité pour le bidonville : il est bien une exception mais précisément pour cette raison, il est en état de nous dire quelque chose sur la globalité de Casablanca, du Maroc, du monde…

 

Notons que cette acception algébrique de la singularité l’approche alors comme un point de l’espace ordinaire qui a quatre propriétés :

1)    ce point est sans dimension (une ligne a une dimension, une surface en a deux, un volume en a trois, un point en a zéro) ;

2)    le point est vu comme limite d’une évolution continue (du rétrécissement du cercle) ;

3)    le point est vu de l’extérieur (comme ce qui pique la main extérieure qui caresse la surface), par un phénomène, c’est-à-dire une apparence ;

4)    le point est une donnée statique : il ne bouge pas (sur la surface) et il ne bouge pas intérieurement puisqu’il n’a pas d’intérieur.

 

On voit l’inconvénient pour notre travail sur les bidonvilles : un bidonville est peut-être un point pour la ville qui le rejette, « un point noir » à résorber mais un bidonville n’est pas sans dimension (1), n’est pas la limite d’une évolution continue (2) car il y a un saut entre lui et son environnement, peut être et doit être pensé de l’intérieur de lui-même (3) et pas seulement par son apparence, est doté d’une dynamique interne (4) - celle précisément sur laquelle nous enquêtons « en intériorité » (et pas en extériorité objectivante comme dans les enquêtes sociologiques et « scientifiques »).

Il nous faut donc compléter notre approche de la singularité par une autre qui va venir se greffer sur la première : non pas la contredire mais la compléter.

2) Singularité topologique

Traiter la singularité comme singularité « topologique », c’est la voir désormais comme un « gros » point.

L’idée de distinguer points ordinaires et gros points parait saugrenue si l’on pense à notre géométrie ordinaire de la droite et du plan : tous les points y sont de même taille nulle !

Pour opérer cette distinction, il faut mobiliser quelque chose qui ressemble à un microscope et qui va permettre de distinguer un « intérieur » des points.

Il faut donc opérer un changement d’échelle, capable de distinguer un intérieur infinitésimal « dans » le point ordinaire.

Un « gros » point sera un point tel qu’on puisse y distinguer une dynamique intérieure infinitésimale (les mathématiciens parlent ici d’« éclatement » ou de « blow up » du point : on associe au point ordinaire une sorte de photo prise au microscope).

Donnons-en quelques images possibles :

-       c’est un peu comme ne plus traiter l’atome comme point insécable (atomisme grec) mais comme dynamique interne d’un noyau et d’électrons ; ou ne plus traiter le noyau comme point insécable mais comme « gros » point fait de protons et de neutrons ; ou comme ne plus traiter le proton comme point insécable mais comme « gros » point faits de différents quarks ; etc.

-       c’est un peu comme si, face à l’impossibilité de poser une bille sur la pointe d’un cône verticalement, on y posait plutôt une minuscule assiette tourbillonnant sur elle-même.

 

La singularité ainsi vue comme « gros » point

-       a une intériorité (une topologie interne) et n’est donc plus sans dimension ; strictement dit, elle a une dimension infinitésimale (donc plus grande que 0 mais inférieure non seulement à 1 mais à tout nombre réel entre 0 et 1) ;

-       n’est plus le terme d’une évolution continue (une limite) mais on y accède par un saut (saut d’échelle, saut dans l’infinitésimal), par une discontinuité donc ;

-       le « gros » point n’est saisissable comme tel qu’en intériorité (infinitésimale) : par le système interne de différences qui l’ossature (on peut y discerner différents points séparés entre eux par des distances infinitésimales, inapparentes de l’extérieur, c’est-à-dire à échelle ordinaire) ;

-       last but not least : le « gros » point est doté d’une dynamique endogène entre ses différents composantes internes (la mathématique parle ici d’une action de groupe) - dans l’image de Martin, ceci tient au fait que le micro-disque posé sur la pointe ne sera stable que s’il tourne sur lui-même.

Conséquences : quatre traits des bidonvilles

L’appropriation de cette singularité topologique à notre lieu de travail - le bidonville - est immédiate.

1)    Le bidonville n’est pas un point privé de toute intériorité : c’est un microcosme ;

2)    Le bidonville n’est pas la limite de la ville, sa banlieue ou sa périphérie mais c’est un lieu en soi auquel on accède par un saut (qu’en général personne ne fait : entrer dans un bidonville ne se fait pas sans s’en rendre compte, comme on peut par contre atteindre la banlieue d’une ville sans en avoir pris conscience : entrer dans un bidonville relève d’un saut, d’une décision) ;

3)    la singularité du bidonville doit être comprise en intériorité, de l’intérieur de lui-même, non par un regard extérieur ;

4)    la singularité du bidonville s’attache à sa dynamique interne, ses échanges internes, « sa vie » - on pourrait dire, en première approximation, que « débrouillardise collective » nomme la dynamique interne qui permet au bidonville de se maintenir « sur la pointe de la ville » sans se décomposer en bicoques dispersées aux différents interstices de la ville.

3) Singularité algébrique / singularité topologique

On voit donc comment singularité algébrique et singularité topologique ici se complètent en se distinguant (plutôt qu’en s’opposant directement s’il est vrai qu’un changement d’échelle opère entre les deux).

Au total, le rapport singularité algébrique / singularité topologique se donne dans les quatre rapports suivants :

1)    sans dimension ou sans intérieur / avec intérieur ;

2)    limite d’une évolution continue / saut discontinu (saut d’échelle) ;

3)    discernement de l’extérieur (phénomène : « ça pique ») / compréhension en intériorité ;

4)    statique / dynamique.

 

Saisir la singularité comme à la fois singularité algébrique et singularité topologique, c’est donc la saisir « singulièrement » (voir la réduplication kierkegaardienne) : c’est parler contradictoirement des contradictions qui la structure comme singularité.

III - De la singularité des bidonvilles

Nous avons avancé dans la caractérisation de ce que « singularité » veut dire (voir étude précédente) et, par-là, de notre hypothèse princeps : les bidonvilles concentrent les grandes contradictions du monde contemporain (mais pas nécessairement toutes !) en leur donnant forme locale d’un gros point.

D’où trois questions :

A.   Que veut dire ici « concentrer » ?

B.    Quelles contradictions du monde contemporain se trouvent ainsi « concentrées » dans les bidonvilles ?

C.    Que veut dire « donner forme locale d’un gros point tourbillonnant à la pointe des villes » ?

1) Le bidonville n’est pas une zone libérée !

Le bidonville n’est pas un lieu libéré de la concurrence capitaliste, de l’esprit petit-propriétaire, du parasitisme en matière de travail, de la servilité à l’égard du Makhzen, de l’identitaire agressif « arabo-musulmane », etc. S’il est vrai que le bidonville « concentre » les contradictions, c’est en effet qu’il ne les filtre ni ne les résout !

Il faudrait donc détailler un bilan de cette enquête sur l’existence :

·      d’un esprit de petit propriétaire,

·      d’une exploitation du travail d’autrui,

·      d’une soumission à l’État,

·      d’une logique identitaire agressive de type « arabo-musulman »

·      alii

À l’inverse, il faudrait détailler les éléments d’enquête qui vont dans l’autre sens : dans le sens d’une émancipation, individuelle et/ou collective, des points précédents de servitude.

 

Le bidonville n’est pas non plus une zone libérable !

Le bidonville est une ligne de faille, une zone de fracture du monde contemporain. Révolutionner le monde contemporain serait s’attaquer à ces fractures en vue de les résorber. Mais il est clair qu’en l’état du monde, nous n’allons pas les bidonvilles en prétendant les révolutionner.

Bidonvilles et camps ?

Faut-il rapprocher le bidonville des camps d’internement, voire de concentration sachant que la singularité du bidonville (pointe ou crête, gouffre ou faille, « trou noir », déchet du monde…) l’en distingue ?

 

« Camp » peut ici s’entendre de deux façons :

-       camp palestinien… ;

Prenons cette photo prise au camp de Khan Younès (sud de Gaza) : on y reconnaît les mêmes baraques aux mêmes toits !

 

Une image contenant bâtiment, terrain, extérieur, rue

Description générée automatiquement

 

-       camp de concentration.

À lire par exemple Chalamov, et l’importance qu’il accorde au monde des truands dans l’économie des camps, on peut se demander si les bidonvilles ne doivent pas être rangés aux côtés des camps dans la catégorie de « situation extrême »…

 

Tout ceci indique un travail d’étude à mener…

2) Le bidonville concentre sept contradictions du monde contemporain.

Formulons ceci en hypothèses de travail.

1)    La contradiction hommes/femmes (action évidente de cette contradiction à l’intérieur du bidonville : les femmes le tiennent [1], les hommes tiennent ou sombrent).

2)    La contradiction villes/campagnes (les gens viennent de la campagne et s’organisent aux lisières - « à la pointe » - de la ville ; le bidonville est marqué par l’opposition des modes de vie citadin/campagnard - voir l’abject mot d’ordre « Villes sans bidonvilles ».

3)    La contradiction centre/marges ou périphérie (le bidonville comme phénomène à la fois marginal et central du monde contemporain ; ceci engage aussitôt la question capitale : selon quelle logique distingue-t-on et oppose-t-on centre et marges : le capitalisme le fait du point de l’économie et du pouvoir d’État ; nous le faisons du point des gens : masses ouvrières et populaires ou autres).

4)    Les contradictions sur le travail (travail gratuit / travail échangé par troc / travail marchand ; travail individuel/collectif…) : analyser plus en détail le travail que fournit le bidonville…

5)    Les contradictions sur la propriété (le bidonville joue - se débrouille avec - les différents types de propriété : privée/publique, du sol/ des murs, appropriation de l’eau et de l’électricité du quartier ; etc.).

6)    Les contradictions dans le rapport à l’État (à la fois forme de soumission au Makhzen en même temps que profonde autonomie pratique par rapport ce qui est considéré comme une clique de menteurs ; donc à la fois intériorisation des contraintes de l’État et subjectivités « à distance » extérieure de l’État…).

7)    Les contradictions entre les dimensions national/international (il est patent que d’un côté tout bidonville ressemble à tout autre - voir par exemple les photos de toits - en même temps que notre bidonville a des traits typiquement marocains - cuisine, habits, religion, climats).

3) Le bidonville est un disque tourbillonnant à la pointe de la ville.

Image associéeImage associéeImage associée

Favelas

« L’action de groupe » donnant dynamique tourbillonnante au bidonville et lui permettant de se stabiliser « à la pointe de la ville » (sans se disloquer en un pur et simple chaos de baraques, pulvérisé aux interstices urbains), c’est la débrouillardise collective !

Ce que débrouillardise veut dire…

Ne pas oublier que cela vient de « débrouiller » !

Étymologie : le verbe est dérivé de « brouiller »

-      1549 = « rendre intelligible à l'esprit ce qui est embrouillé »

-      1822 au fig., pronom., = « se tirer d'affaire, voir clair dans quelque chose »

Donc, la débrouillardise relève de la clarification (cf. le bidonville comme permettant d’y voir plus clair dans le monde contemporain !).

 

***



[1] Il faudrait examiner comment les femmes du bidonville se divisent sur ce point, comme les hommes se divisent manifestement entre ceux qui tiennent et qui ceux qui sombrent.